Modèles de Structures Aléatoires de Type Réaction-Diffusion - Thèse de Morphologie Mathématique - Luc Decker, Ecole des Mines de Paris (1999)
Le temps de calcul requis pour la simulation de la projection et de la solidification
d'une seule gouttelette est relativement court, de l'ordre de 10 minutes sur les
processeurs utilisés (IBM-Power2 et Intel Pentium, avec une vitesse d'horloge de 166 MHz
dans les deux cas). Pour parvenir à ce résultat, l'implantation du modèle a été optimisée
à différents niveaux. Une version spécifique de l'opérateur de collision du Gaz
sur Réseau Immiscible a ainsi été développée de manière à obtenir un temps d'exécution minimal
lorsque le nombre de noeuds du réseau qui présentent un mélange de phases -
est très faible. L'interface entre les deux phases se réduit en effet au
périmètre de la gouttelette, soient quelques centaines de noeuds.
De fait, les temps de
simulation représentent un point crucial du modèle. C'est grâce à leur réduction que
le processus complet de dépôt en couches multiples peut être reproduit. La version
définitive du modèle consiste ainsi à projeter un grand nombre de gouttelettes sur
un substrat dont la géométrie est librement définie. A intervalles de temps réguliers,
une nouvelle gouttelette est introduite à l'entrée du système, en une position aléatoire
sélectionnée uniformément sur toute la longueur du réseau et en tenant compte de
sa périodisation horizontale. Chaque gouttelette s'adapte parfaitement
à la rugosité aléatoire engendrée par la solidification des gouttelettes précédentes:
intrinsèquement, les modèles de Gaz sur Réseau prennent en compte tout type de
conditions aux limites. La géométrie des obstacles peut donc être quelconque,
et évoluer au cours de la simulation. Il a été observé par ailleurs que l'impact
d'une gouttelette perturbe le gaz porteur environnant de manière excessive. En
conséquence, il est indispensable qu'un délai suffisant sépare chaque gouttelette
de manière à re-stabiliser l'écoulement laminaire du gaz porteur.
Cependant, la présence simultanée de plusieurs gouttelettes dans le système reste possible,
à condition que la solidification d'une gouttelette soit (presque) achevée à
l'instant où a lieu l'impact de la gouttelette suivante. En pratique, 500 ou 600 itérations
séparent l'introduction de deux gouttelettes; il arrive rarement que deux gouttelettes
se suivent à la même position d'entrée dans le système.
Par comparaison avec les micrographies de dépôts plasma présentées au chapitre IV-1, un
ensemble standard de paramètres du modèle a été obtenu suite à des ajustements progressifs.
La Figure IV-13 présente l'évolution du système au cours d'une première simulation réalisée
dans ces conditions afin de générer une microstructure en states superposées. Le volume
des porosités qui apparaissent dans l'image finale du dépôt est extrêmement réduit
par rapport aux situations réelles de projection plasma. En première hypothèse, cette
caractéristique trouve son origine dans les conditions idéales de projection reproduites
par le modèle, en relation avec le choix des paramètres effectué pour cette simulation. Au cours
du chapitre suivant, nous présenterons d'autres simulations obtenues plus récemment
qui montrent un taux de porosité beaucoup plus important, associé à d'autres combinaisons
de paramètres du modèle.
Enfin, il est important de remarquer que nous considérons à présent une population
entière de gouttelettes. Celle-ci est caractérisée :
- -
- par sa granulométrie, soit la fonction de répartition des rayons des gouttelettes;
- -
- par ses vitesses de solidification, soit la fonction de répartition des probabilités
d'agrégation , qui est en relation directe avec la répartition des températures
des gouttelettes avant impact.
Un label distinct est attribué à chaque gouttelette - concrètement ce label est utilisé
pour marquer toutes les particules qui font partie d'une même gouttelette. Il n'y a ainsi
aucune restriction à ce que des gouttelettes aux propriétés différentes (par exemple,
avec différentes valeurs de ) se trouvent simultanément dans le système. Parmi
les autres avantages, l'agrégation d'une particule génère un solide ponctuel qui peut
être marqué du même label que cette particule. Il en résulte que la totalité du
dépôt produit par une gouttelette est immédiatement identifiable par son label.
Nous établissons ici la liste des paramètres du modèle,
accompagnés de quelques indications complémentaires.
On distingue les paramètres externes, que l'on peut directement relier aux
conditions de dépôt plasma, et les paramètres internes, qui déterminent
uniquement certains comportements du modèle, ou encore qui ne peuvent être
modifiés comme souhaité.
Paramètres externes
- La durée des simulations : il s'agit en fait du nombre de gouttelettes
projetées, et par conséquent, de l' épaisseur de la couche obtenue.
- La taille du système, mesurée en nombre de noeuds du réseau (ou unités)
Seuls les temps de calculs nécessaires limitent ce paramètre, en relation avec
la durée des simulations.
- La granulométrie des gouttelettes, qui peut être définie librement.
Le modèle accepte toutes les tailles et formes possibles de gouttelettes qui
sont conservées jusqu'à l'impact. Cependant, le rayon minimal des
gouttelettes est de 10 noeuds du réseau environ. C'est le rapport entre la taille
réelle des gouttelettes et leur taille dans le modèle qui détermine
l'échelle de la simulation. Enfin, une courbe granulométrique
complète ne peut être reproduite que pour un échantillon suffisamment
important, et par conséquent, suite à une simulation assez longue.
- La géométrie du substrat, qui est également quelconque.
Toutes les tailles et formes d'obstacles sont envisageables: plans,
rugosités régulières ou aléatoires, fibres, etc..., et bien sûr
limitées par la taille du système.
- La répartition des vitesses de solidification (probabilités
d'agrégation , taux d'infondus), qui est directement
liée à la température des gouttelettes avant leur impact.
L'étalement d'une gouttelette est controlé avec précision: un ensemble
continu de morphologies de dépôts est disponible:
d'une gouttelette infondue à une couche très mince. Cette distribution des
vitesses de solidification doit être reliée à certaines conditions
opératoires du dépôt plasma, modifiant en particulier la trajectoire
de la poudre dans le jet de plasma.
- D'autres paramètres pourraient être facilement introduits, tels que
l'angle d'incidence des gouttelettes (par orientation du champ de force à l'origine
de leur déplacement).
Paramètres internes
- La densité doit au minimum être de particule/cellule en raison de
contraintes liées au modèle ILG, afin que la tension de surface soit suffisante.
Plus cette densité est élevée, plus les fluides sont visqueux. Dans notre cas, il est donc
difficile de réduire cette viscosité.
- L' intensité du champ de force () utilisée pour mettre les gouttelettes en
mouvement. Sa valeur est fixée de manière à ce que le contour
des gouttelettes reste relativement lisse. Lorsque est inférieure à ,
les gouttelettes perdent progressivement leur stabilité au cours de leur déplacement.
La valeur de intervient aussi dans la morphologie du bourrelet formé au cours
de l'impact d'une gouttelette.
- Les probabilités d'homogénéisation du gaz porteur. Elles ont
été ajustées de façon à supprimer tous les effets qui n'ont pas
de sens physique dûs à la présence de ce milieu.
- La probabilité de rebond des particules de gaz porteur sur les
obstacles solides. Ce paramètre a été introduit afin d'augmenter le taux de porosité et
ainsi se rapprocher des situations réelles. Des bulles de gaz peuvent ainsi rester
emprisonnées à l'intérieur des dépôts. La mouillabilité du substrat diminue également
lorsque augmente.
- La précision de la tension de surface : lors des calculs du modèle ILG, une
certaine marge est autorisée lors de la recherche des configurations minimales.
A défaut, des effets de trame ont pu être observés:
les gouttelettes se transforment progressivement en hexagones après quelques milliers
d'itérations.
- Le nombre de cycles d'agrégation et d'écoulement peut également
être modifié afin d'agir sur la structure du dépôt. Actuellement, le cycle
d'évolution élémentaire du Gaz sur Réseau est le suivant: Collisions, Translations,
Agrégations.
- Le seuil d'agrégation en nombre de particules , qui par exemple permet
d'éviter qu'une particule isolée puisse se transformer en obstacle ponctuel.
Decker, Luc. "Modèles de structures aléatoires de type réaction-diffusion". PhD diss. (191 p.), Paris, ENSMP-CMM, 1999.