(III.-14) |
Cependant, seule la concentration de l'espèce intermédiaire est étudiée dans son évolution. Les concentrations et des espèces et respectivement, sont maintenues constantes au moyen d'interventions extérieures au système. Un tel milieu est dit hors équilibre thermodynamique. Plus précisément, le terme macroscopique de réaction chimique est un polynôme de degré , et l'équation de réaction-diffusion prend la forme suivante [Dab90] :
(III.-15) |
Pour des paramètres adéquats, cette dynamique non-linéaire de réaction conduit à trois états d'équilibre: deux concentrations stables
, et une concentration instable , telles
que
. Plaçons-nous
dans le cas où le système est initialisé dans la position centrale d'équilibre instable avec ajout d'un
bruit blanc (
), donc d'hétérogénéités aléatoires de la concentration qui
sont spatialement décorrélées. En raison de la diffusion, il se produit une séparation
du système en deux phases homogènes qui correspondent aux deux
concentrations stables. Le champ de simulation se divise en régions qui basculent vers l'une ou l'autre
des concentrations stables. Alors que les règles d'évolution sont locales, la répartition spatiale
des phases s'organise au niveau macroscopique. Le milieu généré s'apparente alors
à une microstructure binaire. Nous présenterons une réalisation tri-dimensionnelle
du modèle de Schlögl au cours du chapitre suivant, qui traite des
simulations par différences finies des modèles de réaction-diffusion.
Pour les besoins de l'implantation de ce modèle particulier dans leur automate cellulaire,
Dab et Boon en ont étudié une version simplifiée, réduite à un mécanisme
microdynamique impliquant un seul type de particule [Dab89,Dab90,Lawniczak91]. En fonction
de la concentration locale, une particule peut être créée ou supprimée aléatoirement
en tout noeud de la grille, avec une probabilité qui est exprimée analytiquement
en fonction des différentes constantes cinétiques -- ce qui constitue
un cas particulier de l'opérateur de réaction que nous proposons.
Comme il s'agit d'un modèle mono-espèce, exprimons toutes les probabilités
de transition en fonction du nombre
de particules en chaque
noeud. Pour le modèle FHP, varie entre 0 et , et on
a
. En conséquence, le modèle est complètement spécifié
par les paramètres libres
et
, qui peuvent
être réduits à dans le cas d'un comportement symétrique tel que
.
Par construction, ce modèle de réaction génère un processus aléatoire de Markov. Plus précisément, le nombre de particules au noeud et à l'instant étant représenté par la variable aléatoire , la matrice des probabilités de transition décrit l'évolution de cette population au cours des réactions : on pose . Pour ce modèle, on a :
(III.-16) |
Pour toute valeur de , on doit de plus vérifier que
, et
.
Dans le cas d'un processus combinant exclusivement réaction et diffusion (avec un champ
moyen des vitesses
), la Figure III-2 montre les résultats
d'une simulation obtenue pour un jeu de paramètres donné. Après une période d'apparente
latence (jusqu'à
itérations), les réactions débutent réellement
à partir de germes qui correspondent à des fluctuations locales aléatoires
de la densité en particules. On assiste ensuite à la croissance de ces germes selon
des fronts de réaction ( à ). Après 100 itérations, le système se sépare
distinctement en deux phases, sous la forme de domaines homogènes qui représentent
des structures aléatoires macroscopiques. En fin de simulation, l'une des phases devient
largement prédominante () et envahit la totalité du système. Des informations
complémentaires sur ce processus sont fournies par les histogrammes de la Figure III-3 :
la distribution du nombre de particules par noeud reste presque inchangée jusqu'au
temps , en dépit des premiers changements d'organisation spatiale. Après
itérations, le nombre moyen de particules augmente, parallèlement aux
fréquences des noeuds occupés par des populations de particules plus importantes.
Il est important de remarquer que les réactions sont fortement
couplées avec l'hydrodynamique pour ce modèle. En effet, le nombre de particules
par noeud est directement proportionnel à une pression locale. En conséquence,
les gradients de concentrations (très forts) sont à l'origine de gradients de
pression - et donc d'écoulements, comme cela pourrait par exemple s'observer dans un
processus de combustion.
Dans une seconde approche, introduisons le concept de disperseurs : il s'agit
de noeuds particuliers du réseau où les vitesses des particules
sont renversées à chaque itération, exactement comme à la frontière
d'un obstacle. Mais les disperseurs diffèrent tout de même des obstacles
parce qu'ils peuvent renfermer des particules et que les réactions s'y
produisent normalement. De plus, les disperseurs sont a priori ponctuels,
tels des grains de sable. Sur la Figure III-5, on observe les résultats de
l'ajout de disperseurs aléatoires (processus de points poissonniens) au système
réactif étudié, pour des densités croissantes exprimées en pourcentages de la surface
totale du réseau. Il apparaît clairement que ces disperseurs entraînent un changement
d'échelle majeur pour le sytème, en fonction de leur densité. L'augmentation du nombre
de disperseurs se traduit par la diminution du coefficient de diffusion effectif. Il en résulte
une réduction de l'échelle de la microstructure pour un même nombre d'itérations, et
une augmentation de sa finesse. Il est ainsi possible d' ajuster le poids de la diffusion
à partir de la quantité de disperseurs, de manière bien plus précise que par le nombre
de cycles de réaction introduit précédemment; le phénomène étudié en est cependant
sensiblement modifié. Un autre point de comparaison entre
les différentes simulations de la Figure III-5 est donné par les histogrammes
d'occupation des noeuds correspondants (Figure III-6). La distribution de ces fréquences traduit l'influence
de la quantité de disperseurs sur la cinétique du système réactif. En présence
d'un faible nombre de disperseurs, l'histogramme est proche de son aspect initial (voir
l'histogramme pour sur la Figure III-3). Au delà de de disperseurs,
on retrouve des histogrammes plutôt uniformes et semblables à l'état du système après
itérations sur la Figure III-3.
Enfin, la cinétique du système peut aussi être illustrée par l'évolution de la
densité moyenne des particules présentes sur l'ensemble du réseau (Figure III-7).
Il est ainsi mis en évidence que l'évolution globale du système (soit l'augmentation
du nombre de particules) est accélérée en présence d'une augmentation du taux de
disperseurs. Il semble que les disperseurs favorisent nettement
la germination de structures. Grâce à une plus grande longueur des fronts de
réaction, la vitesse de croissance des structures en est globalement améliorée. De fait,
toute diminution de la diffusion peut être considérée comme une augmentation relative
de l'importance des réactions.