A deux dimensions, la représentation des concentrations sous forme
d'images ne pose pas de problème particulier, que ce soit à l'aide de niveaux de gris,
ou de "fausses couleurs" (palette "arc-en-ciel" : concentrations croissantes du bleu
au rouge). Parmi les autres possibilités, citons aussi les images multi-canaux
qui permettent de combiner les concentrations de différentes espèces, ou encore les palettes de
couleurs aléatoires destinées à mettre en évidence les lignes ou régions d'égales concentrations.
La transformation linéaire de l'espace continu des concentrations vers l'espace discret
des intensités ou niveaux de couleur d'une image peut être effectuée dynamiquement
en détectant les extrema des concentrations à représenter (à un instant donné), ou bien à partir de
paramètres de normalisation constants, à fixer pour chaque modèle.
A trois dimensions, il existe de nombreuses manières de représenter un
domaine et de mettre en valeur les structures qu'il renferme. La solution
la plus simple consiste à montrer ses faces, en tant qu'images bidimensionnelles
plaquées sur un parallépipède. Cependant, la quasi totalité
de l'information est perdue avec une telle méthode, qui n'est donc pas satisfaisante.
Une solution plus appropriée consiste à sélectionner un intervalle
de concentrations remarquables pour transformer le domaine en un ensemble
binaire, formé de vides et de parties solides. Les structures étudiées se présentent
souvent comme des régions de concentrations homogènes, parfois même comme des
milieux biphasés. En conséquence, le choix d'un intervalle de concentrations
adéquat s'effectue presque naturellement; cette binarisation s'avère bien adaptée à la situation.
Elle nous permet ensuite de produire des rendus réalistes des structures au moyen d'un
logiciel de lancer de rayons [POV-Ray96], en fonction d'un jeu complet de paramètres
tels que la position de l'objectif, le mode de projection, l'illumination ou encore
l'aspect de surface. Tout voxel qui appartient à la surface de l'ensemble binaire
à représenter est ajouté aux instructions de tracé sous la forme d'une
simple primitive géométrique (un cube unitaire) dans un espace continu. Afin de réduire le nombre de cubes à tracer, il est
possible de les assembler en parallépipèdes de plus grandes dimensions. Un
lissage additionnel des structures peut aussi être calculé par le logiciel de rendu: on place alors
une sphère contenant un champ de densité radial en tout point de la surface des structures. Les
contributions de ces champs s'additionnent et par seuillage du champ résultant, une
isosurface est obtenue. Ce type de lissage convient particulièrement aux structures produites
par réaction-diffusion, dont les contours sont arrondis en raison de la diffusion. Il
s'agit en quelque sorte d'une extrapolation de la structure binaire initialement
constituée de voxels cubiques.
La solution du lancer de rayon, que nous avons adoptée, présente de nombreux avantages: il est
possible de se déplacer virtuellement autour d'un objet, ou de s'en approcher. Une
séquence vidéo montrant sa rotation autour d'un axe peut par exemple
être réalisée. En fait, notre logiciel de simulation de structures produites
par réaction-diffusion se comporte comme un modeleur de textures volumiques binaires;
les instructions de tracé sont ainsi directement générées au cours des simulations.
Par ailleurs, des anaglyphes (images en relief)
peuvent être facilement produits en calculant deux rendus
d'une même scène avec un léger décalage de l'objectif qui correspond à
la distance entre les deux yeux d'un observateur. Les vues sont
ensuite combinées dans une image couleur RVB à regarder avec des lunettes
colorées rouge(R)/cyan(VB) restituant une vue différente pour chaque oeil, selon
un procédé de vision stéréo bien connu. Nous incluerons quelques images
de ce type dans les chapitres qui suivent, de manière à rendre plus "réelles"
nos structures purement virtuelles. Deux autres méthodes de visualisation
ont été expérimentées avec moins de succès. Dans le premier cas, nous avons
tenté de rendre les structures partiellement transparentes; le résultat
des rendus par lancer de rayon prête à confusion, en raison de la complexité
des structures et de leur imbrication. Dans le deuxième cas, la visualisation
des concentrations est basée sur une réalisation d'un nuage de particules aléatoires
(points poissonniens) dont la densité est régionalisée et proportionnelle
à la concentration locale. Ces particules sphériques sont ensuite visualisées
au moyen du logiciel de lancer de rayon; le nombre de particules est très
important, ce qui constitue le principal inconvénient de cette approche.
Finalement, l'édition de séquences vidéo permet de juger visuellement de l'évolution temporelle d'un modèle: les images des concentrations sont calculées à intervalles réguliers puis assemblées. On opère de la même façon avec les rendus tri-dimensionnels produits par lancer de rayon. Il est également intéressant de créer des tracés spatio-temporels de profils uni-dimensionnels de concentrations, où l'un des axes de coordonnées représente le temps.
Remarques préliminaires :